Accueil > S’informer > Communiqués et publications > Communiqués et dossiers de presse > Censure de la loi contre l’accaparement des terres par les Sages : Terre de (...)
Communiqué de Presse
vendredi 24 mars 2017
La volonté des parlementaires d’élargir le droit de préemption des Safer sur les parts de société vient d’être stoppée par l’arrêt du Conseil constitutionnel du 17 mars 2017, censurant les articles 1 et 3 de la loi relative à la lutte contre l’accaparement des terres agricoles. Les Sages ont jugé que le maintien du contrôle du marché foncier serait attentatoire à la propriété privée et à la liberté d’entreprendre. Le monde dessiné par cet avis, où l’entreprise et la propriété individuelle priment sur le bien commun, n’est pas celui dans lequel Terre de Liens souhaite vivre. Terre de Liens appelle à ce que tous les moyens légaux soient mis en œuvre pour que le marché foncier agricole reste régulé en France.
La loi en question, votée avec l’accord de la droite et de la gauche en février dernier était certes complexe à mettre en œuvre. Elle permettait néanmoins de compliquer le contournement des Safer et d’envoyer un signal clair sur la volonté de réguler le marché foncier agricole. Cette loi aurait bien évidemment pu être complétée par d’autres textes la renforçant. Depuis 1962, les Safer régulent le marché foncier. Bien que souvent attaqué, le droit de préemption des Safer n’a jamais été supprimé, ni jugé anticonstitutionnel en regard du droit de propriété et de la liberté d’entreprendre. La sociétarisation et la financiarisation de l’activité agricole empêchent aujourd’hui les Safer de remplir leurs missions. Terre de Liens ne comprend pas en quoi rétablir le pouvoir de régulation des Safer serait contraire à la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen.
Le Conseil constitutionnel a mis le doigt sur une des faiblesses techniques de cette loi : les Safer préemptant une cession partielle de parts de société, elles ne prennent pas le contrôle de ladite société. Néanmoins, les Sages ont oublié d’aller au bout du raisonnement. En effet, une telle intervention des Safer aboutirait à une neutralisation du but de contournement de la préemption poursuivi par les acteurs d’un transfert de parts sociales. La possibilité pour les Safer d’imposer un statut quo dans la gouvernance des sociétés, même sans en gagner le contrôle, permettrait de faire échec à l’opération de contournement du contrôle du marché foncier. Car c’est bien ce contournement qui était visé par la loi. Dans les faits un tel droit aurait eu avant tout un pouvoir dissuasif, les préemptions des parts de société auraient été en nombre très limité.
En l’état, poursuivre le vote de textes élargissant le droit de préemption des Safer sur les parts de société semble inutile. Néanmoins, Terre de Liens invite les parlementaires, les juristes, les syndicats agricoles, la société civile et bien sûr les Safer à faire preuve d’imagination pour proposer des mesures en état de maintenir l’effectivité de la régulation du marché foncier agricole. L’article L.101-1 du Code de l’urbanisme affirme que : « Le territoire français est le patrimoine commun de la nation. » Il convient que la nation se dote des outils permettant de préserver ce patrimoine commun !
Nous appelons toutes les forces politiques à se saisir de la question pour que lors de la prochaine législature une loi foncière permettant de lutter contre l’accaparement des terres en France soit votée. Une première mesure pourrait être la mise en place d’un contrôle du transfert de parts de société possédant du foncier agricole par un agrément public. Le défaut d’agrément public permettrait d’empêcher la vente. Si la Constitution est un frein à cela, Terre de Liens n’est pas opposé à une révision de la Constitution permettant de soumettre la propriété privée à l’intérêt général. Un tel système existe aujourd’hui en Allemagne. Nul doute que le Conseil constitutionnel hésiterait à considérer que nos voisins et partenaires violent les droits de l’Homme par une telle disposition.
Nous tenons à rappeler que la transition vers une agriculture française respectueuse des équilibres sociaux, territoriaux et environnementaux ne peut avoir lieux que si le marché foncier agricole est régulé et sa financiarisation stoppée.
Terre de Liens appelle les élus professionnels, les élus territoriaux ainsi que les services de l’État et les associations de défense de l’environnement à s’investir et siéger dans les Conseils et comités des Safer, en Commission départementale d’orientation agricole et en Commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers pour que cette régulation soit effective et au service d’une agriculture respectueuse de l’environnement. En tant qu’acteur de la société civile, Terre de Liens sensibilise le grand public à la préservation des terres agricoles afin de fournir à nos représentants dans ces instances une base sociale de soutien.
Né en 2003, Terre de Liens réunit aujourd’hui plus de 16 000 citoyens qui ont rendu possible l’acquisition de 127 fermes partout en France : plus de 3 000 hectares de terres sont dédiés à une agriculture paysanne, biologique ou biodynamique : maraîchage, arboriculture, productions laitières et fromagères, apiculture, plantes aromatiques et médicinales, viticulture, etc. À ce jour, plus de 200 paysans pratiquent leurs activités sur ces terres puis commercialisent leurs productions essentiellement en circuits courts (vente à la ferme, marchés, amap, magasins de producteurs, cantines locales...).
www.terredeliens.org
Voir en ligne : Télécharger le communiqué au format PDF
Plan du site
Préserver les terres agricoles, faciliter l’accès des paysans à la terre et développer l’agriculture biologique et paysanne, voilà les engagements qui mobilisent Terre de Liens.
Mon association régionale