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Nos propositions pour protéger la terre

Publié le 6 juin 2023 , mis à jour le 23 octobre 2023

Sommaire
Jeunes pousses - Ferme de la Briqueterie © Pierre Porte-Kieffer

Les terres agricoles représentent la moitié du territoire français. Elles nous nourrissent et nous rendent une multitude de services. Si les terres agricoles disparaissent, c'est tout le vivant et y compris nos vies humaines qui sont en danger. Pourtant, elles sont attaquées de toute part, coulées sous le béton, polluées par des pratiques agricoles industrielles. Dans un contexte de changement climatique d’effondrement de la biodiversité, poursuivre dans cette voie, c’est hypothéquer la capacité de la terre à nous nourrir, alors que notre alimentation dépend à 97% de la terre.

Problèmes

Artificialisation

Les surfaces artificialisées désignent toute surface retirée de son état naturel, forestier ou agricole, qu’elle soit bâtie, revêtue (voiries, aires de stationnement) ou fortement modelée par l’activité humaine (carrières, mines, parcs urbains). Malgré les alertes incessantes, les surfaces artificialisées progressent implacablement. Depuis 40 ans, ce sont 55 000 ha de terres agricoles qui, chaque année, disparaissent sous le béton (l'équivalent d'un terrain de foot toutes les 7 minutes !). Cette surface pourrait nourrir une ville moyenne comme le Havre. Or, nous ne savons pas recréer, à un coût décent pour la société, de la terre nourricière après l’avoir artificialisée.

Infographie - Artificialisation des terres par secteurs

L'artificialisation a des conséquences irréversibles pour les écosystèmes. Il est donc urgent de limiter drastiquement cette altération des sols, qui réduit notre capacité à nous nourrir, détruit les écosystèmes, perturbe le cycle de l’eau et contribue aux émissions de gaz à effet de serre.

Des solutions existent !

Un état des lieux des infrastructures existantes est un préalable pour connaître réellement les capacités en logement, en espaces économiques, etc. Miser sur la rénovation de l’existant avant d’artificialiser plus d’espaces agricoles, naturels et forestiers et ne permettre l’artificialisation de nouveaux espaces que pour des besoins impérieux d’intérêt général.

La ferme Pierre-Jeanne, située à Saint-Romain-de-Puy dans la Loire, résiste encore et toujours à l'artificialisation © Antonin Bachès
En Auvergne, nous nous sommes mobilisés contre plusieurs projets d’urbanisation menaçant des terres agricoles. Ces expériences sont l’occasion de créer de nouvelles alliances avec des associations de notre territoire, mais aussi de nous lancer dans un plaidoyer sur la mise en œuvre effective de l’objectif de zéro artificialisation nette dans le cadre de l’élaboration de plusieurs plans locaux d’urbanisme intercommunaux.
Lucie André

Terre de Liens Auvergne

Dégradation des sols

Outre l’artificialisation, les terres subissent de très fortes dégradations sous l’effet des activités humaines, dont l’agriculture industrielle, friande d’engrais et de pesticides de synthèse. Ceux-ci portent atteinte à l’ensemble de l’écosystème, tuant les insectes et invertébrés indispensables au fonctionnement des sols, polluant les rivières et les milieux aquatiques, détruisant les habitats naturels et les sources de nourriture des animaux. Par ailleurs, le recours à des machines agricoles toujours plus grosses tasse les sols, ce qui accélère leur érosion, qui menace 18 % des sols français. Ces pratiques agricoles ne sont pas durables en termes de consommation de ressources naturelles, d’impacts sur le climat, la biodiversité et la santé.

Des solutions existent !

D’autres techniques agricoles, comme l’agriculture biologique, sont possibles pour limiter le travail du sol, supprimer les pesticides, diminuer les doses d’intrants et favoriser le recyclage du carbone dans le sol. Ces techniques proposent de produire avec la terre et son écosystème et non à ses dépens. Elles ont la capacité de produire une alimentation saine pour l’ensemble des Françaises et Français, tout en respectant l’environnement et la biodiversité.

Ferme de La Durette © Terre de Liens - Sandrine Mulas

Effondrement de la biodiversité

L’agriculture industrielle est basée sur la simplification des pratiques, le machinisme, et l’usage important de pesticides et intrants de synthèse, qui génèrent un effondrement de la biodiversité de deux ordres : perte de biodiversité cultivée (nombres de variétés végétales cultivées et de races animales élevées), liée à la simplification des systèmes de production et à la sélection ; et la perte de biodiversité sauvage.

Infographie - Perte des oiseaux des milieux agricoles en France

Les causes sont plurielles, mais elles sont principalement liées à l’usage intensif de pesticides, à la destruction des habitats (arbres, haies, mares, etc.) résultat de la forte spécialisation des exploitations agricoles et des territoires en termes de productions agricoles.

Des solutions existent !

Face à cela, les pratiques agroécologiques, interdisant l’usage de pesticides de synthèse et reposant sur le maintien voire l’augmentation des habitats pour la biodiversité sauvage (haies, mares, talus, bosquets...) sont à privilégier. Les liens entre agricultures et élevages à l’échelle des fermes comme à l’échelle des territoires sont à renforcer.

Paillage des haies à la ferme de La Solive © Eric Bedin
En Dordogne, c’est en 2020 que nous avons commencé à agir concrètement pour intégrer la biodiversité dans les fermes Terre de Liens. Nous souhaitons aujourd’hui donner à voir ce que nous avons fait ici pour montrer qu’un autre modèle agricole, conciliant agroécologie, préservation du vivant et des ressources naturelles et équilibre économique, est possible.
Jacques Chèvre

Terre de Liens Aquitaine

L’eau, ressource sous tension

Sans eau ni plantes, ni humains ni aucun être vivant ne sont capables de vivre. Polluée, accaparée, détournée, l’eau est malmenée et le changement climatique modifie la répartition des pluies, aggrave les épisodes de sécheresse ou de déluge, augmente la température de l’eau de mer et rend de plus en plus incertain sa disponibilité et sa qualité. Cela impacte les activités agricoles car, du fait de l’augmentation des températures, les cultures irriguées ont des besoins en eau qui augmentent (+ 20 % depuis 1960). L’eau à usage agricole est principalement utilisée pour l’irrigation des cultures et l’abreuvement du bétail. Le secteur agricole est donc particulièrement dépendant de la disponibilité en eau.

La responsabilité de l’agriculture est grande. En France, elle est la première consommatrice d’eau (en été, l’agriculture peut représenter jusqu’à 80 % de l’eau consommée dans les zones géographiques où les ressources sont les moins importantes) et les intrants de synthèses qu’elle utilise sont responsables de la pollution de nombreux cours d’eau et ont déjà rendu impropres à l’alimentation humaine de nombreux captages d’eau.

Source : France Nature Environnement

Des solutions existent !

Selon les pratiques déployées sur les fermes, l’impact sur la ressource en eau peut être catastrophique ou au contraire très bénéfique. Des adaptations peuvent être trouvées pour concilier vocation écologique et agricole des parcelles humides, (utilisation de races plus rustiques, utilisation de semences et variétés plus résistantes aux inondations ou à la sécheresse, implantation d’arbres ou de prairies permanentes qui retiennent l’eau dans les sols).

Blé de la ferme des Salelles © Eléonore Henry

Changements climatiques

Le modèle agricole conventionnel est dans une impasse. Responsable de 20 % des émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine, il subit de plein fouet les effets des changements climatiques. Concernant les émissions de gaz à effet de serre, elles sont notamment liées à une importante consommation d’énergies fossiles, l’usage intensif d’engrais azotés (très consommateur d’énergie pour leur production), la non couverture des sols l’hiver et les émissions de méthane des ruminants. Ces émissions participent à l’accélération des changements climatiques, auxquels l’agriculture doit faire face (modification des cycles de pluies, allongement des périodes de sécheresse) car ils engendrent une modification de la structure des sols ou encore l'apparition de nouveaux parasites et maladies des cultures.

Des solutions existent !

Les pratiques agroécologiques peuvent contribuer à un meilleur stockage du carbone dans les sols et une meilleure gestion de la ressource en eau. Par ailleurs, avoir une utilisation sobre des machines, favoriser l’implantation de panneaux photovoltaïques sur les bâtiments agricoles ou encore éviter l’utilisation d’engrais de synthèse gourmands en gaz, sont une nécessité pour atténuer la part du réchauffement climatique imputable à l’agriculture.

Plantations © Terre de Liens PACA

Nos propositions

Tendre vers le zéro artificialisation

Fixer des objectifs ambitieux de zéro artificialisation à horizon 2050 sans recourir à la compensation (engagement à compenser la perte environnementale par une protection ou restauration, ailleurs). La seule construction qui devra pouvoir être permise est celle de logements accueillant une vraie mixité sociale en « zone tendue ».

Une taxe d’urbanisation élevée devrait rendre l’extension urbaine plus chère que le renouvellement de la ville sur la ville pour les aménageurs (incitative). Cette taxe serait bien distincte de la taxe d’aménagement (L 3311-1 et suivant du code de l’urbanisme) même si son architecture pourrait en être proche. Cette dernière, déjà en vigueur, vise à faire contribuer les aménageurs aux frais engagés par la puissance publique pour permettre leur aménagement (voirie, réseaux, etc).

Lutter contre la spéculation liée au changement d’usage

Taxer fortement les plus-values réalisées lors de la vente de parcelles autrefois agricoles et devenues constructibles pour désinciter les ventes liées à un changement dans le plan local d’urbanisme et ainsi conserver la vocation agricole des terres.

Protéger les terres par des pratiques agricoles écologiques

L’agroécologie et ses performances sociale, économique et environnementale sont posées en préambule de la Loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt de 2014 et dans le Code rural. Terre de Liens demande que ces objectifs soient pris en compte dans toutes les politiques agricoles et à toutes les échelles du territoire :

Politique d’installation : Faire de chaque nouvelle installation agricole un pas vers la transition agroécologique grâce à un dispositif de bonification fortement incitatif pour l’agriculture biologique, l’agroforesterie et les infrastructures agroécologiques.

Régulation foncière : Encadrer les Schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles (SDREA*) pour qu’ils respectent mieux les objectifs de préservation de l’environnement et de la biodiversité.

Maintien de l’agriculture biologique : Utiliser les solutions de portage et stockage foncier pour maintenir en agriculture biologique les terres déjà converties, notamment à la cessation d’activité des agriculteurs.

Fiscalité : Développer des mesures fiscales pour inciter à la reprise des terres en agriculture biologique.

Investissement : Financer des infrastructures agroécologiques (haies, mares, etc.) sur les espaces agricoles ou forestiers pour des systèmes plus durables.

*Le SDREA établit les orientations régionales du contrôle des structures agricoles souhaitant s’installer ou s’agrandir et définit les priorités à observer en cas de demandes concurrentes

Verdir la Politique Agricole Commune (PAC)

Les pratiques agricoles réellement favorables à l’amélioration des écosystèmes (agroécologie) doivent pouvoir être rémunérées. Ainsi la PAC valoriserait le travail des paysans qui bénéficie à la société et à l'environnement. La PAC doit aussi pouvoir subventionner les efforts de transition mis en œuvre par les paysans pour pouvoir adopter des pratiques plus écologiques.

Ne subventionner avec de l’argent public que le portage foncier avec des engagements écologiques

Demander aux organismes de portage foncier (propriétaires de terres agricoles mettant les terres à disposition d’agriculteur·ices) qui bénéficient d’argent public (subvention, prêt, investissement ou défiscalisation) d’utiliser systématiquement des baux ruraux environnementaux avec des clauses ambitieuses pour la mise à disposition des terres portées. L’argent public doit participer au bien public.

Comment agir avec nous ?

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Des ressources pour aller plus loin

L'état des terres agricoles en France : des terres en perdition (2021)

Malgré les alertes incessantes, les surfaces de terre artificialisées en France progressent inexorablement. Le chapitre 1 du rapport de Terre de Liens "L'Etat des terres agricoles en France" fait un état des lieux de l'artificialisation et la dégradation des sols aujourd'hui en France.

Du sol au foncier, des fonctions aux usages, quelle politique foncière ? (2023)

Appuyé sur une analyse approfondie du sol et de son rôle à la fois environnemental et territorial, cet avis est une réflexion sur l’état des lieux des sols en France et expose différents outils de politique foncière et d’urbanisme destinés à encadrer plus durablement leur utilisation.

Sols artificialisés et processus d’artificialisation des sols : déterminants, impacts et leviers d’action (2017)

L'artificialisation du territoire est aujourd’hui considérée à la fois comme l’un des principaux facteurs d’érosion de la biodiversité et comme une perte nette de ressource pour l’agriculture et les espaces boisés et naturels. Ce rapport montre que limiter l’artificialisation des sols doit aussi s’accompagner d’outils pour réduire les impacts de l’artificialisation.

Le bail rural à clauses environnementales (2015)

Ce document présente le contexte et les dispositifs précédent la création du bail rural environnemental et l’évolution du paysage « agro-environnemental » dans leurs cadres législatif et réglementaire.

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