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Publié le 13 janvier 2025 , mis à jour le 13 janvier 2025
Retour sur une journée riche, dédiée à interroger et développer les pratiques des collectivités et acteurs locaux pour mobiliser les propriétaires privés.
La journée du 5 décembre 2024 co-organisée par Terre de Liens PACA avec le Conseil Départemental 06 et le réseau RÉCOLTE s’est tenue à Nice en présence d’une cinquantaine de participants : agents et d’élus de collectivités, mais aussi des acteurs du monde agricole (SAFER, Chambre d’Agriculture, ADEAR), ainsi que la DDTM, des associations locales et des acteurs de la recherche. Associés au projet < InTERRE PAT>, 5 Projets Alimentaires Territoriales (PAT) à l’échelon intercommunal et celui du département placent tous, selon diverses modalités, la défense du foncier agricole comme axe prioritaire de leur politique alimentaire.
D’évidence l’enjeu est fort, illustré par de simples rappels qui ont ouverts cette journée. Pêlemêle : 1 à 1,5% d’autonomie alimentaire dans le département des Alpes-Maritimes, des zones de montagnes abandonnées et menacées par la fermeture des paysages, quelques friches agricoles dans la plaine du Var qu’on pourrait encore « sauver », des propriétaires historiques mais aussi des groupes d’investisseurs présents sur un territoire largement urbanisé où seules parfois demeurent quelques enclaves agricoles, une concurrence d’usage non seulement dans le cas de foncier rendu constructible mais aussi par un reclassement en zone humide. Face à cela les acteurs du territoires s’activent : le Conseil Départemental qui met à disposition à des agriculteurs trois terrains, un premier PPEANP dans le Val de Cagnes, un espace-test agricole permanent dans la plaine du Var mise en place par la Métropole de Nice pour 1 à 2 porteurs de projet ; enfin une multiplicité de PAT à tous les échelons du communal au département qui représentent autant d’espaces de concertation.
En France 85% (22 millions d’ha) du foncier agricole est propriété privée, dont 34% en indivision et pour une moyenne d’âge de 65 ans. Un agriculteur traite, en moyenne, avec 14 propriétaires (12 en région Sud PACA).
Avec le constat partagé du peu d’impact immédiat que peuvent avoir des réunions de propriétaires telles qu’on les connaît, collectivités et partenaires institutionnels s’interrogent sur l’adoption de nouvelles pratiques. Lors de cette journée, le pari a été fait de capitaliser sur les expériences innovantes menées sur un petit panel de territoires et bénéficiant de l’éclairage de la recherche. Ces témoignages et d’autres peuvent être retrouvés sur le site < RECOLTE , plateforme initié par Terre de Liens et l’INRAE afin de partager les retours d’expérience des territoires.>
Dans le PNR des Alpilles, au cœur d’une région rurale située entre Avignon et Arles, une « chasse aux friches » encadrée par 2 projets FEADER a été menée avec succès (Guide à destination des propriétaires). On y dénombre 760 exploitations pour des terres irriguées à 65% (exclusivement par des canaux). Ailleurs, l’héritage historique et/ou diverses actions phares ont pu amener des collectivités à endosser le rôle de propriétaire, bien que cela ne soit pas leur vocation. Ainsi, la Métropole de Lyon possède 300 ha sur lesquels sont installés 230 agriculteurs. On peut encore citer l’exemplarité d’un projet de territoire dans la vallée de la Bruche (67) qui, d’abord motivé par l’enjeu d’ouverture du paysage, s’est révélé multi-bénéfique par la création d’une association foncière pastorale (AFP).
Tel qu’il a été rappelé, ce n’est pas avec un discours généraliste, mais au contraire par un traitement au cas par cas qu’il convient d’aborder les propriétaires fonciers. Il faut être présent dans la durée, dans une relation quasi individualisée alors qu’un publipostage ne génère qu’environ 15% de retours. A l’échelle d’un territoire doit émerger un récit capable de rassembler autour d’une certaine idée du bien commun. Rassembler donc… par exemple en mixant les publics à l’occasion de tout type de rencontres : adhérents d’une AFP avec les autres propriétaires, propriétaires et porteurs de projet, propriétaires de terres cultivées et propriétaires de friches comme cela fut le cas en novembre dernier à Lyon avec 25 agriculteurs réunis autour du « puzzle des friches ». Perçue comme une confrontation bénéfique, cette réunion plus technique que politique a en effet regroupé majoritairement des « personnes parlant le même langage et partageant les mêmes valeurs » qui ont pu ainsi échanger d’égal à égal sur les analyses divergentes qui motivaient leur choix. Aussi, ne pas hésiter à se servir des outils de l’urbanisme en ayant recours, par exemple, à la création d’un périmètre de protection des espaces naturels et agricoles périurbains (PENAP) qui les préservera durablement de la spéculation. Un tel classement a pu, dans le cas de la Métropole de Lyon, servir à capter des terres qui, n’étant plus agricoles, échappaient à toute possibilité d’intervention de la SAFER.
D’évidence cette volonté partagée demande des ressources coûteuses en efforts et en temps, elles seules permettront d’assurer une animation performante de cette thématique au sein des territoires. Réjouissons-nous qu’une telle journée ait pu témoigner de l’interopérabilité effective entre des acteurs déjà tous partie prenante aux différents PAT du département. Tous partagent l’ambition d’agir pour (re-)mettre en culture un foncier agricole précieux d’autant qu’il est rare ou menacé, afin qu’émerge un projet alimentaire à la hauteur des enjeux. Il nous revient maintenant à interpeler les responsables politiques locaux pour bâtir les conditions d’une relation fructueuse avec les propriétaires.
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