Les fermes
Actualités

Communiqués de presse

Arnaud Rousseau ou l’accaparement des terres et des aides de la PAC : quand les pratiques de la présidence de la FNSEA démontrent l’urgence d’une loi agricole qui laisse s’installer de nouvelles générations

Publié le 4 mars 2024 , mis à jour le 4 mars 2024

© Yuriy Bogdanov - Unsplash

En réaction aux informations révélées par l’émission Complément d’Enquête au sujet de la mégaferme du président de la FNSEA, les associations AGTER, Les Amis de la Terre et Terre de Liens appellent à ce que la question de l’accès aux terres soit au cœur de la loi agricole attendue pour la fin mars.
Il est urgent de considérer la FNSEA comme ce qu’elle est : un syndicat dont la politique et les pratiques mises en œuvre par ses dirigeant·es favorisent la concentration foncière et empêchent l’installation d’une nouvelle génération agricole.

Une FNSEA “hors-sol” qui ne veut pas parler de la terre

Le silence de la FNSEA sur l’accès aux terres agricoles a été assourdissant ces dernières semaines, là où ses revendications, reprises par le gouvernement, ont été si bruyantes à l’occasion du grand mouvement social qui secoue l’agriculture française depuis des semaines. Pourquoi le foncier est-il à ce point absent du débat ? La raison saute aux yeux depuis le documentaire Complément d'enquête diffusé par France 2, qui démontre qu’Arnaud Rousseau, alors qu’il était déjà un dirigeant influent de la FNSEA, s’est constitué une mégaferme de plus de 700 ha. Il a pour cela utilisé un mécanisme juridique, dit de “montage sociétaire” : il s’agit d’acquérir des entreprises qui contrôlent des terres, plutôt que de les acheter directement. Aujourd’hui la surface additionnée des exploitations agricoles dirigées par Arnaud Rousseau et sa femme (700 hectares) dépasse de plus de 90 hectares (soient 125 terrains de foot) le “seuil d’agrandissement et de concentration excessif” de la région Ile-de-France fixé par l’État. A noter que, toujours selon l'État, 274 hectares suffisent à la bonne marche d’une ferme pour 2 personnes dans la région - surface déjà bien supérieure à celles des fermes avec lesquelles nos organisations travaillent.

Une ferme qui s’agrandit prend de la terre qui n’ira pas à l’installation de nouveaux agriculteurs

Ce mécanisme était certes légal, mais résultait d’un angle mort de la loi. D’ailleurs, au moment de ces opérations douteuses, la FNSEA communiquait contre ces montages sociétaires, ce que monsieur Rousseau ne pouvait ignorer au vu de sa position privilégiée au sein du syndicat. En 2021, la loi pour réguler l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires, dite “Sempastous”, a tenté de corriger le phénomène en instaurant un contrôle par le préfet des achats de parts sociales de société contrôlant des terres. Cependant cette loi - soutenue à l’époque par la FNSEA, reste largement inopérante car elle prévoit toutes les dérogations permettant la concentration des terres.

Enfin, du fait de ce montage financier, Arnaud Rousseau touche plusieurs fois la “surprime PAC” allouée aux 52 premiers hectares, de l’argent public pourtant fléché pour soutenir en priorité le revenu des petits et moyens agriculteurs et agricultrices. C’est un détournement des aides de soutien aux petites fermes. C’est aussi contradictoire avec la défense des revenus paysans, dont la FNSEA se fait pourtant le héraut depuis plusieurs semaines. Enfin, cela trompe la statistique agricole et les services de l’Etat qui sous-estiment la concentration des terres, croyant voir 4 fermes distinctes, là où il n’y en a qu’une.

Renforcer le code rural pour assurer le renouvellement des générations

Face à cette duplicité, nos organisations demandent que la question de l’accès aux terres agricoles pour la nouvelle génération d’agriculteurs et d’agricultrices soit remise au centre des débats et au cœur de la future loi d’orientation agricole qui doit passer en conseil des ministres fin mars. En effet, sans répartition équitable des terres, il sera impossible de permettre un renouvellement des générations, de lutter contre les inégalités de revenu criantes dans notre agriculture, ni d’assurer la transition écologique et la souveraineté alimentaire. C’est pourquoi nous exhortons le gouvernement à prêter l’oreille à d’autres propositions que celles de la FNSEA et qu’il ajoute à son projet de loi des mesures facilitant l’accès aux terres de la relève agricole, qui ne pourra pas s’installer “hors-sol”. 

Nos organisations demandent d’une seule et même voix :

  • la mise en place d’un répertoire des exploitations, pour identifier clairement qui possède et utilise les terres, et mettre au jour les montages sociétaires tels que celui mis en œuvre par A. Rousseau ;
  • un observatoire opérationnel des marchés des terres : ces données sont en effet indispensables pour mettre en œuvre une régulation de l'accès aux terres en faveur d’une agriculture paysanne et écologique, et ainsi lutter contre la concentration des terres.
  • Le renforcement et la démocratisation des dispositifs et instances de régulation de l’accès aux terres.
  • L’instauration d’un plafonnement des aides de la PAC selon le nombre d’agriculteurs et d’agricultrices  travaillant sur la ferme.

SIGNATAIRES
AGTER, Les Amis de la Terre, Terre de Liens

Partager

Mots clés

© Terre de Liens 2024

En poursuivant votre navigation, vous acceptez l’utilisation de cookies