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Où est passée la grande Loi sur le renouvellement des générations d’agriculteurs·trices ?

Publié le 2 avril 2024 , mis à jour le 2 avril 2024

© Raphael Rychetsky / Unsplash

Elle devait être une grande Loi d’orientation agricole à même de répondre à l’immense défi du renouvellement des générations agricoles et d’une agriculture soutenable sur tous les plans. Elle arrive finalement sur la table du Conseil des ministres en forme de chèque en blanc à l’agro-industrie. Après des mois d’attente et alors que la crise agricole ne cesse de dire l’urgence de changer structurellement la politique agricole française, Terre de Liens dénonce des manques significatifs dans le projet de Loi d’orientation agricole présenté ce mercredi en Conseil des ministres.

La “souveraineté alimentaire” à n’importe quel prix

C’était le "Projet de Loi d'Orientation et d'Avenir Agricoles", puis le "Projet de Loi en faveur du renouvellement des générations". Passé sous les radars de l’actualité, le projet de loi d’orientation agricole aurait pu être une des réponses majeures à la crise agricole qui secoue aujourd’hui l'agriculture française. 

Rebaptisé à la faveur de la crise (et du vent) “Projet de loi pour une agriculture souveraine”, le projet de loi se donne aujourd’hui pour ambition de répondre à l’enjeu de souveraineté alimentaire de la France. Si Terre de Liens se félicite d’une telle ambition, sur le papier, la réalité est en fait toute autre et relève d’un court-termisme dangereux. A rebours de la définition de droit international, la “souveraineté alimentaire” dans cette loi se préoccupe plus de la balance exportatrice agricole de la France que de l'alimentation des Français ou du revenu des agriculteurs jetés en pâture à la concurrence internationale sur l’autel du libre-échange. Comble du désespoir, la seule mesure sur l’accès aux terres, la création du Groupement Foncier Agricole-Investissement (GFA-I), favorise l’investissement de non-agriculteurs dans les terres sans aucune garantie que ces dernières ne servent à l’installation, ni à nourrir les Français, ni même qu’elles ne soient dédiées à des pratiques environnementales.

France Services Agriculture (FSA) : pourquoi changer une équipe qui perd ?

Mais encore faut-il qu’il y ait des fermes et des agriculteurs·trices pour « faire français »… Alors que plus de 14 000 fermes ont disparu en France depuis le lancement officiel du processus il y a 18 mois, le projet de loi censé favoriser le renouvellement des générations pourrait au contraire décourager les installations, faisant craindre de passer dès 2030 sous la barre de moins de 400 000 agriculteurs·trices. L’article 10 sur la réforme de l’organisation du parcours d’accompagnement à l’installation, la création du réseau France Services Agriculture (FSA) et l’obligation faite à tout candidat de justifier d’avoir été accompagné via ce service pour accéder à une liste d’aide publiques (non définie à ce jour) est un recul majeur. Par sa logique de guichet unique, il met de côté toute une partie de l’écosystème de l’accompagnement agroécologique et pourrait rebuter des candidat·es qui ne souhaitent pas se tourner vers les Chambres d’agriculture. Les chiffres parlent pourtant d’eux-mêmes : aujourd’hui en France, l’accompagnement des réseaux de l’agriculture paysanne représente 1/3 des nouvelles installations. 

Cela fait 18 mois que l’on veut croire à la volonté du gouvernement de faire la part-belle à la diversité des modèles agricoles pour réussir le renouvellement des générations et la transition écologique de notre agriculture, mais le projet de loi actuel dit tout le contraire. C’est une porte ouverte aux modèles les plus destructeurs, la validation du modèle de la ferme des 1000 vaches ou des 1 million de poulets dont personne ne veut, pas même les agriculteurs·trices eux-mêmes.
Tanguy Martin

Responsable plaidoyer

Une crise agricole qui dit pourtant l’urgence d’agir

1946, invention du fermage qui privilégie l’usage des terres plutôt que la propriété pour permettre aux agriculteurs d’investir dans leur outil de production. 

1962, réforme des structures et naissance des SAFER qui permettent de limiter la taille des fermes pour éviter la concentration des terres et des richesses. 

Il fut un temps où les lois d’orientation agricole étaient à la hauteur des enjeux de leur temps. 

En janvier 2024, des agriculteurs et des agricultrices de toutes les sensibilités ont dit leur malaise face à des prix qui ne les rémunèrent plus et à l’absence d'accompagnement de la société sur le plan de la transition. Force est de constater que le gouvernement n’a su pour l’instant répondre qu’à coups de mesurettes court-termistes. Terre de Liens appelle les député·es et les sénateurs·trices à rectifier le tir d’urgence. 

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