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Communiqués de presse
Publié le 15 décembre 2023 , mis à jour le 15 décembre 2023
Pacte, loi d’orientation et d’avenir agricole, fonds entrepreneur du vivant… le gouvernement a entre les mains une série d'opportunités pour adresser l’urgence du renouvellement des générations agricoles, alors qu’un·e agriculteur·trice sur quatre partira à la retraite d’ici 2030. Terre de Liens décrypte les annonces du ministre Marc Fesneau, qui a dévoilé les contours du Pacte d’orientation agricole ce vendredi lors d’un déplacement en Normandie.
Le projet de loi et le Pacte dédiés à l’avenir de l’agriculture française, attendus depuis septembre, prennent enfin forme, après des mois d’annonces partielles et de fuites dans la presse spécialisée. Ainsi, lors de son déplacement à Yvetot ce vendredi 15 décembre, Marc Fesneau a enfin partagé les axes structurants du Pacte. Terre de Liens note que le ministre a prêté attention à son appel, relayé par de nombreux députés* : en effet le Pacte d’orientation agricole prévoit cinq mesures pour garantir l’accès au foncier pour les nouvelles générations d’agriculteur·trices. Par ailleurs, Terre de Liens relève avec satisfaction que les mécanismes de la régulation foncière comme les “schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles” (SDREA) sont envisagés comme des leviers de transformation des modèles de production. Le Pacte prévoit ainsi la modification des règles de priorité afin de préserver les surfaces en agriculture biologique et d’encourager des pratiques agricoles écologiques. Cela signifie que dans certaines zones (les aires d’alimentation prioritaires de captage) des pratiques agro-écologiques (au sens large, donc : bio, Haute Valeur Environnementale, élevage extensif…) se verront octroyer la priorité dans le cas d’un agrandissement. Si la mesure a le mérite d’exister, il est indispensable de la renforcer :
*Lors de l’audition du ministre mercredi 13 décembre par le groupe de suivi relatif à la préparation de la loi d’orientation agricole.
Le Ministre de l’agriculture est revenu ce matin sur le fonds “entrepreneur du vivant”. Cette enveloppe*, annoncée par le président Macron en 2022, devait initialement répondre au problème de l’accès au foncier, principal frein au renouvellement des générations (une installation nécessite 200 000€ en moyenne - voir le rapport de Terre de Liens). Mais sur les 400 millions d’euros prévus pour ce fonds, environ 15 % seulement seraient consacrés au portage foncier** de moyen terme, soit une enveloppe de 60 à 80 millions d’euros. Ce montant est dérisoire : en une seule année, les volumes échangés sur le marché des terres s’élèvent à 7 milliards d’euros. L’enveloppe consacrée au foncier dans le fonds “entrepreneur du vivant” concernera donc 0,1% des terres agricoles qui se vendent chaque année (Calcul réalisé par Terre de Liens, sur la base d’un portage d’une durée moyenne de 10 ans). Les moyens ne sont clairement pas au rendez-vous des ambitions du gouvernement, qui, avec ce fonds “entrepreneur du vivant” a pourtant promis “d'investir dans une alimentation saine, durable et traçable, afin d’accélérer la révolution agricole et alimentaire sur laquelle la France est un pays leader”.
*Le “fonds entrepreneur du vivant” consiste au versement de fonds publics portés soit au capital de sociétés qui possèdent des terres et les louent à des agriculteur·trices, soit directement dans le capital de sociétés d'exploitation agricole.
**Le portage foncier consiste en “la mise à disposition d’un exploitant (individu, société…) par un propriétaire foncier (individu, indivision, société foncière, collectivité, associations, coopératives…) de biens agricoles soit en location (baux ruraux en fermage ou métayage) soit par convention d’occupation précaire (Safer, Collectivités)”, CGAAER, Evolution des modes de portage du foncier, 2023.
Le gouvernement semble pris au piège du “en même temps” présidentiel : comment enclencher la transition agroécologique et assurer le renouvellement des générations agricoles voulues par le Pacte, en limitant la spéculation sur les terres agricoles, lorsque les objectifs du plan de relance “France 2030” (le plan de relance “France 2030” prône “l’investissement, l’innovation et la ré-industrialisation”) visent avant tout la rentabilité et la liquidité ? C’est cette contradiction que sont appelés à résoudre les trois ministères en charge du suivi du fonds “entrepreneur du vivant” (le ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, le ministère de la Transition écologique et le ministère de l'Économie et des Finances), lors d’une réunion prévue la semaine du 18 décembre, où ils devront arbitrer la doctrine et la répartition de cette enveloppe. Nous appelons les ministres à inscrire le fonds “entrepreneur du vivant” dans la logique du Pacte Loi d’Orientation Agricole : il doit permettre à des nouveaux agriculteurs et agricultrices de s’installer et d'accélérer la transition agricole via le changement de pratiques opéré sur le foncier. Or, à ce jour, nous constatons que le gouvernement est davantage tenté par des dispositifs au service de la rentabilité pour les investisseurs privés (voir le communiqué de presse de Terre de Liens en réaction aux annonces de septembre). La conditionnalité agroécologique et sociale et les conditions de revente du foncier agricole doivent être adressées d’urgence, sans quoi la portée du fonds - déjà limitée - ratera sa cible.
Le Pacte prévoit par ailleurs la création d’une nouvelle forme de fonds d’investissement destinée au portage du foncier agricole : le groupement foncier agricole d’investissement (GFAI). Il permettrait de mobiliser des ressources financières pour l’acquisition et la gestion de terres agricoles. Ce dispositif, adopté par le Sénat en octobre (voir le communiqué de presse de Terre de Liens), met l'accent sur l'attractivité pour des investisseurs. Non seulement cet outil ne répond pas aux difficultés d’installation agricole, mais il accentue la financiarisation du foncier agricole. Terre de Liens, qui acquiert des terres agricoles grâce à l’épargne citoyenne depuis plus de 20 ans, met en garde contre l’utilisation de fonds publics au service d’acteurs lucratifs. L'orientation du portage foncier vers des investisseurs ayant pour priorité un retour sur investissement financier (lucrativité) sélectionnera en effet les agriculteur·trices capables de payer les loyers les plus élevés. De fait, les porteurs et porteuses de projet les plus à même de mettre en œuvre la transition agroécologique seront écarté·es, car porté·es vers des surfaces et des loyers plus faibles, cohérents avec des pratiques agroécologiques et créatrices d’emploi.
L’Etat doit encourager le développement des structures de portage foncier tout en orientant leur action vers les besoins de la société : la préservation des ressources naturelles et la souveraineté alimentaire. A cette condition seulement, portage pourra rimer avec partage. La doctrine du fonds “entrepreneur du vivant” sera arrêtée dans les prochaines semaines. Terre de Liens demande au gouvernement de veiller à ce que les fonds ou garanties publiques mobilisées pour les dispositifs de portage foncier visent l’intérêt général et non l’enrichissement des investisseurs privés, que ce soit pour le “fonds entrepreneurs du vivant” ou le GFAI. Pour cela, l’Etat doit veiller à :
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